jeudi 22 septembre 2022

Converge - (2006) No Heroes

(2006) - Sur Discogs

Que dire encore ? Après plusieurs essais et l'album référence, ils voulaient confirmer, ce qu'ils ont fait. Le tour de la question aurait pu être faite. Que dire de plus ? Ben Koller pouvait-il faire plus fort ? En fait oui. Où est sa limite ? Pourquoi une limite ? Il blast, il cogne, il castagne, il effleure et il frappe sur tout ce qui reste trop longtemps inanimé, il s'ouvre à de nouveau son, il est partout même quand il ne dit rien. Ballou en profite pour faire l'inventaire et ne reste pas en panne de slides, distillant contre-temps malicieux et riffs assassins dans des structures... quelles structures ? On parle de punk, ici. Nate Newton, l'oublié de la bande - et pourtant !, fait vrombir sa basse là où on en a besoin, copulant avec sa soeur à six cordes ou volage, laissant libre court à ses envies, plus claquante que jamais, parfois même groovy. Le quartet répète tranquillement ses gammes avec une énergie lavique déchaînée. 

Bavant son sludge, pour mieux créer des ambiances de fin du monde (le Weight of the World semble nous écraser), avant de nous asséner des coups de machette mathcore sans merci, le groupe plonge même dans l'interdit avec un chant -très- clair (très bien exécuté) sur le doom Grim Heart (qui sonne musicalement un peu comme du Melvins). Un morceau qui n'est pas sans rappelé les tentatives similaires (et tout autant réussies) de leurs confrères de Dillinger Escape Plan. Mon dieu, j'allais oublier de parler de Jacob... Mais faut-il parler de Bannon après ce que je viens de dire ? La maestra. Toujours aussi juste, toujours plus profond, toujours aussi poétique. 
La volonté de prendre un peu plus de recul (pour mieux sauter) et de décompresser leurs morceaux offre au groupe l'occasion de laisser éclater des passages plus heavy, plus nuancé ou des climats plus variés. Sans se trahir, il va sans dire : ce sont des éléments qui ont toujours fait partie de leur musique, en micro-doses, mais qu'ils laissent se développer organiquement au seins de la frénésie hardcore qui a fait leur réussite. 

Ils n'avaient pas fait le tour de la question, ils viennent de le faire. Je ne peux me résoudre, en y appliquant un maximum d'objectivité, à affirmer qu'il y a quelque chose à jeter sur ce disque. Cette album sera définitivement vu comme un exercice mineur, durant lequel la bande se répète, mais je pense que c'est une erreur. Ils y soumettent ce qu'ils ont fait de mieux, parfois en mieux. Je le trouve, par exemple, supérieur à l'excellent You Fail Me qui avait jouit de la renommé de son prédécesseur en étant une (excellente) suite spirituelle. On perd le sel du concept, un brin de charme, mais on y gagne un panorama musical riche. Que dire de plus ? Je pense que l'on tient là un authentique "best-of" d'originaux.

A
(comme dirait J.J., parce que la musique est bonne)

mardi 20 septembre 2022

Wet Leg - (2022) Wet Leg


Une histoire aussi improbable ne peut pas s'inventer. Sur l'Île de Wight, il n'y a plus de hippies depuis longtemps, parfois un festival et même une université. En dehors des cours, on s'ennuie vite à l'Île de Wight, et quand on commence à avoir la bougeotte, faire la fête, c'est pas mal. Et quand on a pas de musique pour s'amuser, on en fait soi-même. En dehors des cours, les deux comparses de ce qui deviendra les Wet Leg se mette à faire de la musique ensemble, mais ce n'est qu'après quelques années de symbiose qu'elles forment ce projet et auto-produisent un titre devenu viral : Chaise Longue. Véritable tube hyper-dansant, la hype se construit autour d'un futur album et la suite se fait attendre. 

Bien décidées à ne pas réitéré la même formule, le duo accouche d'un album varié, aux textes modernes, un brin féministes, pas démagos, définitivement seconds degrés, aux consonances très brit pop (Wet Dream), pop rock (Oh, No), balade pop (Loving You) , flowerpower (Supermarket, très Beatles), dreampop, sunshine pop à la Mama's & The Papa's (Angelica),... 
Notons d'autres très bonnes surprises dont un autre tube imparable, le power brit pop Ur Mom, inexorablement entraînant ; mais encore l'étonnant Convincing qui nous charme avec cette voix à la Lana Del Rey mais aux accords et contre temps intimidants ; la douce balade Piece Of Shit, terriblement nerveuse ou Too Late Now, spleen et noisy.

Se referme une collection de chansons pleines de variétés et de contrastes, aux idées diverses, jouant sur des multiples variations autour de motifs simples, mais aux structures qu'ils ne le sont pas toujours autant.
Un album charmant avec sa naïveté et ses petits défauts, sa maîtrise et ses folies. Une parenthèse d'un fun contagieux. Honneurs aux dames.

B+ 
(like all day long on the chaise longue)

Melvins - (1987) Gluey Porch Treatments

Attention, moment important dans l’histoire du son lourd. Ces trois kids de Washington amateurs de punk hardcore se mettent à jouer de plus en plus lentement. Sûrement pour faire chier. Ce sont des braves gamins mais foutre le brin, c’est quand même marrant. Alors en cachette, on ramène un pot de slime dans le dos de la maîtresse et on le fait dégouliner dans le pupitre et on le regarde s’infiltrer lentement, pataud, en gloussant.Ce slime, c’est la guitare de King Buzzo : elle est ronde, crue, collante, lourde, abrasive. Et comme un slime, ça rebondit, sa prend la forme que l’on veut sans jamais tout à fait se laisser dompter, mais on peut improviser et, surtout, s’amuser. La batterie poisseuse de Dale Crover, c’était la petite étincelle pour que l’allumette sente le souffre. Bruler des trucs, c’est marrant aussi tiens. C’est chaud, vivant et ça part vite dans tous les sens. Ces mecs auraient pu devenir les Beastie Boys, par passion pour Black Sabbath ou Jimi Hendrix, ils sont devenus les Melvins.

Quand Black Flag invente le concept du sludge, par inadvertance, ils ne pouvaient pas s’imaginer que ces petits malins allaient pousser le concept toujours plus loin. Qu’ils allaient garder la structure du (post-)punk, juste garder des sections de musique, des plans, mais sans s’ennuyer à en faire des morceaux compliqués. Qu’ils allaient inventé le son d’un trou noir, cette étoile en fusion qui finit par s’effondrer sur elle-même. Que les rues puantes, les sons rouillés, les caves de répét’ humides, les odeurs de bois moisi allaient s'agglomérer en un point infiniment dense et lourd. A l’image de ce titre d’introduction, Eye Flys, sludge, drone, ambiant, plombé (impossible que Khanate n’ait pas entendu ce morceau).

Influencé par le doom, le post-punk, l’hardcore, ponctué de solos grincents, d’atmosphères noires et blanches, aux inombrables nuances de gris, de structures torturées, de chants à l’emporte-pièce, les Melvins affirment l’existence d’un genre nouveau-né et y mettent dors et déjà une patte très personnelle, sans jamais y revenir, influençant tellement de gamins, de Seattle entre autre. On est pas là pour rigoler mais qu’est-ce qu’on se marre !

B+
(with all the heavyness of the load)

samedi 17 septembre 2022

Satyricon - (1994) The Shadowthrone

                                    La version remastérisée de 2021 ci-dessus sert de référence à cette chronique


Le froid opaque lance des lames sur les joues rougies à vif. Un manteau cotonneux habille la forêt et grisaille un ciel de jais. Les hurlements de la bise étouffent légèrement les pensées, les pulsions, autant de pêcher en éclosions. Les regrets et la dépression figent chaque mouvement en un geste solennel de mort. Les arbres et leur silence se font de plus en plus menaçant. Le long des souffles glacés se faufilent, en des mouvements amples comme l'éternité, une force fulgurante, plus vieille que le temps. Pour unique réponse, il ne reste qu'une voix écorchée pour pleurer.
Les cavalcades de guitares forment un mur venimeux sur lesquels viennent s’échouer quelques nappes ambiantes, chants liturgiques, arpèges de guitare électro-acoustique, rires surhumains, menaces,... Porté par une production largement supérieure, possédant une plus grande palette de textures et de reliefs et une maîtrise des divers outils en hausse évidente, les longs morceaux progressifs qui composent Shadowthrone jouissent d’un sens mélodique encore plus raffiné que par le passé. Ne vous trompez pas, cet album pourrait difficilement être plus black metal : moins ambiant, moins acoustique que le premier, ce second effort compense par son énergie misanthropique.

On nage en eaux sombres, entre un Enthrone Darkness Triumphant de Dimmu Borgir et une version black metal du Morningrise d’Opeth, avec sa rythmique lente, aux changements de tempo soignés. Des titres comme Hvite Krists død (à tiroir), Vikingland (guérrier) ou le majestueux The King of the Shadowthrone sont autant de moments de bravoures d’une caste supérieure.

Les sonorités médiévales et païennes ne sont pas perdues mais sont mieux digérées, plus subtiles. On perd certes le charme que la variété du premier LP avançait mais on gagne en technicité, en plastique et en justesse d’écriture. Une pièce maîtresse.

A
(comme un glaviot noir)

mardi 13 septembre 2022

The WRS - (2020) The WRS

On pense parfois devoir chercher loin pour trouver son bonheur. La vérité est parfois sous nos yeux, occultée par les flash des médias, parfois tapis dans des endroits sombres, faute de mieux pour se montrer. C’est ce qu’on appelle une scène locale. Il faut s’y investir pour se rendre compte qu’on fait parfois vachement bien avec beaucoup moins et pas si loin d’ici.
J’en viens à ce trio de Namur,
The WRS , qui sévissent dans vos locaux, arrières salles et cafetard défraîchis avec leur surf rock efficace. Après un LP “Live At Rockerill” (plus Made In Belgium, tu meurs), ils entrent dans un studio, ou du moins un local avec des micros, et lâchent la bête : leur premier effort auto-titré, histoire de faire le tour de la question.

Avec Magic Powder, on est loin de la poudre de perlimpinpin : après sa longue intro drone ponctuée d’arpèges de guitare, la déferlante surf rockabilly. Le chant beuglé inintelligible, la batterie énergique, les guitares psychés et des breaks savoureux nous emmènent vers un monde de fun fumeux et fumé.
Avec l’entraînant Spit, on se remémore un peu les Who des débuts alors que le rock’n’roll n’est pas oublié sur 3’s For Lala et ce long solo guitare halluciné.
Les réverbes dans tous les sens, le rythme effréné, les saturations et une prod de caves donnent une tonalité très garage à l’ensemble du disque.
De décors en décors, on porte l’oreille sur Byzance, plus ambiant et posé qui nous envoûte de ses consonances moyen-orientales, son crescendo et son final épique, voir furieux.
On part faire un tour sur les mélodies imparables At The Bottom Of The Sea, et il s’y en passe des choses, avant un voyage à pied, au plancher, et le heavy et saturé NIBY (Nobody Is Perfect But You).

Inavouable clôture le débat en le résumant : ses voix perchées, hurlées, sa rythmique plombée, ses guitares médusés et sa prod bien garage pour une approche punk mais bon-enfant.
C’est un peu comme cette pochette : un plaisir simple. Grande écriture ? Dieu, non. Un feeling ? Que du feeling. Du fun ? Bon dieu, ouai !

B
(c'est Byzance, ici)


Vianney - (2014) Idées Blanches

 



Une enfance paisible, en pleine ville lumière, à écouter le paternel graté des classiques de la chanson française. Rien de plus ne pousse le jeune Vianney à prendre la plume et esquisser ses propres pièces.
Soutenue par Isabelle Vaudey, qui deviendra sa manager, l’auteur-compositeur voit son premier single, "Pas Là", prendre un essor populaire assez étonnant. Apprécié des jeunes avec ses textes astucieux mais simples, il est une énigme à résoudre : hoax ou graine de talent ?
Puisqu’on bat le fer tant qu’il est chaud, il tente l’exercice de longue haleine et boucle un premier LP, sujet de cette humble étude.


Dès le joli et légèrement reggae "Aux Débutants de l’Amour", la première influence majeure se fait entendre, Georges Brassens : un style d’écriture décontracté mais authentique, ce phrasé clair et se jouant des syllabes. L’inspiration (ou l’hommage ?) se poursuit tout le long de la galette mais saute encore bien plus aux oreilles sur le délicat et réussi "Notre-Dame-Des-Oiseaux" (en hommage à son école d’enfance) ou il y articule les mots et roule ses “r” comme l'aurait fait l’éminent héraultais. Mais bien d’autres noms peuvent prétendre faire partie des forces impulsives (de l’arrière-garde ou de la nouvelle scène).
L’album met du temps à se mettre en route avec plusieurs morceaux simples, certes bien réalisés, aux paroles adroites et prometteuses, mais assez oubliables, faciles ("Tu Le Sais" ; "Chanson d’Hiver", inoffensive ; "On Est Bien Comme C"a, qui sonne définitivement comme un générique de série France Télévision).
Le tube révélateur sus-cité ("Pas Là") aux arrangements sympas, violons accrocheurs, couplets efficaces et refrain gaga qui s’infiltre dans la mémoire vive (de manière presque agaçante) ne manque bien sûr pas à l’appel.
Ce titre, à l’image de l’album, est très produit, pas toujours subtilement, peinturluré comme un camion volé.
En outre, les morceaux souffrent de quelques imprécisions de jeunesse et manquent de patte : ce "Labello", aux jolies lignes mélodiques mais au refrain naïf ou "Mon Étoile" à l'interprétation forcée.

A contrario, des titres comme "Je Te Déteste" (et ses changements de tempos intélligents) ou Veronica (son intro sifflée ingénieuse et ses mélodies vocales intouchables) élèvent le niveau avec des compositions fines, entraînantes, et des textes accrocheurs. Le guitariste-chanteur y dévoile un peu de son avenir, y démontre un style plus typé et semble s’aiguiser au fil des minutes. Même constat pour l’original "Les Gens Sont Méchants" aux aires vraiment réussies et son pont final qui met d’accord. "Tout Seul" et ses accords entêtants aurait pu figurer sur la fournée auto-titrée suivante.

Voici donc un premier album loin d’être mauvais mais encore trop fragile, démontrant un vrai talent inné de composition brut mais dont l'expérience doit encore en sculpter les formes et les contours. L’écriture est déjà plaisante et pose des bases saines.
Les idées sont là, l’envie pour sûr, mais il manque un savoir faire, comme l’indique ces refrains souvent translucides.
La version augmentée offre la possibilité de jeter une oreille sur la reprise heureuse de "Lean On" de Major Lazer. Car le garçon démontrera qu’il a le nez creux pour faire des reprises inspirées.


B-

(tous les gens ne sont pas méchants)

dimanche 11 septembre 2022

Slipknot - (2008) All Hope Is Gone


Il y a, à priori, des albums pour lesquels on doit accorder plus de temps. Non pas à cause de la nature intrinsèque du disque, ce n’est pas toujours par complexité et austérité, mais à cause de notre oreille fatiguée, inattentive ou tout simplement non avertie. C’est un peu le cas de All Hope Is Gone que je n’ai pour ainsi dire jamais touché pendant plusieurs années avant de, au hasard d’une playlist sur un service de streaming bien connu, replonger le nez dedans et me demander ce qui avait bien pu se passer.

Premier constat à l’écoute, le groupe s’y emploie à montrer leur visage le plus heavy, en prenant un parti-pris moins violent et plus mélodique, plus "chansons" (toute proportion gardée). Bien qu'ils y sont déjà revenu, dans une moindre mesure, sur l'exercice précédent, notons un plus grand nombre de solos guitares (tout en feeling, sans trop de démonstration). Après les escapades aventureuses sur The Subliminal Verses, le groupe a pris goût pour prendre son temps et laisser souffler leurs pièces.

Là où Slipknot s’est toujours affiché sans réelle influence majeure (sauf sur le premier auto-produit et ses influences Mike Patton-ienne), je trouve qu’il est difficile de ne pas entendre l’empreinte de Pantera sur ce disque, pour son côté heavy mais sans concession mais surtout son chant plus hardcore mais sensible. J'appellerai à la barre Gehenna, balade lourde, embrumée, avec son chant qui monte dans les aigus, atypique de Corey Taylor ou du groupe. Je ne peux m'empêcher de penser à des titres tel This Love ou Cemetary Gates, à la fois menaçants et poétiques. Joey Jordison n’en fait pas trop et y reste très juste (il ne sait toujours pas s’arrêter mais reste juste). C’est un point (selon moi positif) récurrent sur l’ensemble de la galette.

Pour mieux illustrer mon propos, outre cette réussite, notons deux autres balades. Snuff, balade rock aux guitares electro-acoustiques, qui renvoie un peu (un peu) à Vermillion Pt. 2, en moins dépouillé et plus grandiose, plus Stone Sour, où le batteur se refrène de toute velléité. Ou le très heavy-FM Dead Memories, très beau morceau, lourd, où l’homme au masque kabuki s'y donne à cœur joie mais ponctue le titre d’un aspect death metal qui contraste avec succès son penchant mélodique.


Les 9 savent toujours écrire des hits metal et ne s’en privent pas avec l’excellent Sulfur et son refrain diablement entêtant ou Psychosocial, un des plus grands succès populaires du groupe, dans lequel ils ont savoureusement bien mis tout en place pour que ça tape du talon. Le morceau d’ouverture, dans la pure tradition des (sic), Sarcastrophic ou autre Slipknot, écume ses plans impétieux avec une maîtrise qui renvoie ses homologues au rang d’épisodes sympas.

Mais il savent encore écrire des choses inédites également, dont ce remarquable Butcher’s Hook, construit presque uniquement sur des contre-temps, ce qui n’est pas sans rappeler la djent en vogue, mené par un refrain nu-metal des débuts du groupes.

Le sardonique This Cold Black sort également du lot avec cette course-poursuite entre les cordes, fûts, groupe et auditeurs, une cavalcade qui m'evoquerait une version extrême et sombre du Surrender d’Elvis Prestley... (ndr : fuck me, right ?)

Dans le mois bon, parlons de Vendetta, très bien écrit pour le live, avec ses changements de tempos et d’ambiances, mais qu’on ne retiendra pas. Wherein Lies Continue et sa belle mélodie vocale, la pièce la plus heavy metal 80’s des familles, souffre de convenance. Rien de honteux à signaler.


L’épilogue éponyme, death metal et rapide à souhait, refrain ample et puissant, vient mettre un point final à une œuvre qui n’aura définitivement pas plus à tous. Certes, le son de la bande masquée est un peu oublié mais la sincérité est palpable. J'aime à envisager ce disque comme une parenthèse plus posée et mélodique, plus nuancé, qui sera quand même l’occasion pour le groupe de livrer des prestations live plus polychromiques. Le niveau d’écritures est très bon et la somme totale de réussites plaide largement en la faveur de cette offrande. Et ne venez pas me parler d’album commercial, ça ne sera jamais un argument recevable.


A-

(vous qui entrez ici, n'abandonnez pas tout espoir)

vendredi 9 septembre 2022

Satyricon - (1994) Dark Medieval Times

1994 - Sur Discogs 

La version remastérisée de 2021 ci-dessus sert de référence à cette chronique

La nuit s'épaissit, la rumeur des machines et des âmes se profilent au loin, gonflent. Un violon strident, annonciateur, suit une ritournelle infernale avant de s'évanouir dans  un mur de saturation. Une voix d’outre-tombe, d’outre-temps, le déchire dans une longue complainte. Les orgues (de chez Yamaha) laissent place à quelques obscurs arpèges de guitare mais le mur dévastateur les rattrape. L’album à commencé depuis 3 minutes et le scénario du premier titre, Walk the Path Of Sorrow, n’en est pas à sa moitié. Ce titre cinématographique, captivant, étale ses mille-et-une idées et un sens de l’écriture raffiné. Les riffs sont autant de mélodies et les claviers ornementent les titres sans leur piquer la vedette, leur donnant une infinité de nuances de gris. 

Comme sur l’épique morceau-éponyme, au nom adéquat, les norvégiens arrivent à dégager, sur plusieurs morceaux, une consonance… médiévale. Pas uniquement via cette mélodie hors du temps à la flûte mais également dans ses moments les plus black-métalleux.

La production est absolument dégueulasse mais parfaitement assumée, dans cette vision esthétique propre au black metal de l’époque (ce grésillement, ce n’est pas votre baffle).

Après le rock et ingénieux Skyggedans, Min Hyllest Til Vinterland propose une longue et magnifique pièce de néo-folk qui aurait pu inspirer leur compatriote Vàli.

Le très heavy et black metal Into The Mighty Forest annonce un peu le black’n’roll à venir avec ses riffs gras et volcaniques.

On est si peu dans la démonstration que le groupe à tout le temps de construire ses ambiances et ses compositions alambiquées. Je prends pour témoin le très sympho The Dark Castle In The Deep Forest et ses relents sombres, embrumés, voire horrifiques (qui aurait pu influencer un certain Cradle Of Filth).

Taakeslottet enchaîne les plans furieux et pondéreux sans relâche pour finir sur un moment presque ethereal avant de disparaître dans le néant (ce fondu tout moisi mais, ô combien efficace).


Et merde, c’est déjà fini.

Un grand album de black symphonique ? Non, c’est bien plus que ça. C’est un mélange de tous les genres et tous les adjectifs tirés par les cheveux que je viens d'énoncer sur trente lignes. Un album au son unis, avec ces claviers en toile de fond, mais à la structure protéiforme, dont la production surannée (et la pochette craignosse) le dessert aujourd’hui. Un pur produit de son époque, un black metal païen des premières heures (dans la trempe des Burzum ou Stormblast de Dimmu Borgir, parmi les plus connus). Un premier album qui en impose de par sa maturité, dévoilant tout l’éclectisme et le refus du duo de faire du surplace. Un grand album de metal.


A

(et plein de paint-corpse dégoulinant)



jeudi 8 septembre 2022

Stromae - (2022) Multitude

 


Une nappe de clavier froide, un chœur world d’outre-tombe et des lyrics d’enragés. Ainsi commence le premier album en neuf ans de l’international bruxellois Stromae. Neuf longues années passées à gravir les échelons de la gloire, à trébucher sur ses travers et à chuter dans le précipice de la dépression. Le jeune homme est marqué psychologiquement et physiquement, il se cache dans le contre-jour des projecteurs, pour se protéger, et ses amateurs l’attendent. Avec ce premier titre, Invaincu, crescendo vindicateur, il balance un pied à la face de cette maladie invisible et l’autre à l’étrier. Efficace.
S’ensuit Santé, premier titre à avoir émergé sur le net, avec sa guitare sèche et son sifflement samplé capiteux, un pur produit estampillé Stromae.

La fête à la déprime continue avec la triplette La Solassitude (ses basses sous-marines), l’excellent et engagé Fils De Joie (une interprétation aboutie et des textes au top soutenant une boucle de violon entraînante mais mélancolique) et le tube L’Enfer.

Ce dernier représente parfaitement l’approche musicale et de production de cette galette, plus épurés que Racine Carré, tout aussi inventive, mais d’une habileté d'exécution de très haute gamme. L’auteur-compositeur ne se sent plus dans l’obligation de nous faire danser pour nous charmer et écrit ce qu’il ressent, dont ce texte très personnel, sensible. Un morceau simple mais qui sonne comme il doit.

En hommage à celui-ci, qui le comble de joie, Paul écrit C’est Que Du Bonheur, pour son fils, pour lui expliquer toutes les misères d’avoir un enfant. Reviens gamin, c’était pour jouer, surtout que ça n’invente vraiment pas le lait en poudre mais c’est sacrément bien écrit.

Ce jonglage entre instruments traditionnels du monde et l'électro-pop d’aujourd’hui restent la marque de fabrique de l’artiste, comme sur Pas Vraiment, sa mélodie imparable au ney turque et son phrasé savant en contre-temps. 

Plus loin, Mon Amour, petite balade inoffensive au ukulélé parle des déboires de l’adultère sur une mélodie indécollable (ce contraste musique/texte nous ramène à Moules Frites sur l’opus précédent). On clôt ce nouveau chapitre de l’artiste avec l'étonnant diptyque Mauvaise Journée / Bonne journée. Le premier au consonance latino revient sur le thème de la dépression : un titre sombre, chanté avec émotion. Mais la lumière et l'espoir s'aperçoivent au bout du scion, sur Bonne Journée, miroir musical et thématique de la moins bonne, qui prouve, encore une fois, que tout est une question de perspective. Un mouve astucieux et réussi.


Je ne sais pas ce qu’on pouvait attendre après neuf ans mais un album honnête et plus personnel me convient très bien. Court, le bas blesse quand il faut compter les compos en deçà, Riez ou Déclaration, mais le sens de la mélodie et la production aux petits oignons en font, en fait, des moments plus que sympathiques. Qu’y-a-t-il à jeter sur cet album ? Rien, sincèrement. Qu’est-ce qu’il y a à porter au nue ? Un peu de tout, pas grand chose. Un retour en grâce, moins varié que le précédent, plus maîtrisé, moins fédérateur, plus personnel. Encore une fois, tout est une question de perspective.


A-

(plutôt côté Bonne Journée)


mercredi 7 septembre 2022

Converge - (2004) You Fail Me

 

2004 - Sur Discogs - La version Redux sert de référence à cet article

Quand le quatuor de Salem entre en studio pour empaqueter You Fail Me (YFM), ils ont eu plus que l'occasion de roder leurs morceaux dans l’intimité de la tournée Jane Doe, principalement lors de jams à l’occasion des soundchecks. Si vous trouviez le précédent opus compact et sombre, vous serez servis. Effectivement, autant musicalement que thématiquement, YFM s’inscrit dans la continuité de son aînée, morte sans nom. 
Dès First Light/Last Light, avec ses accords de guitares electro-acoustiques, le groupe nous emmène dans une descente infernale. Telle cette main coupée sur la pochette, qui nous tirerait les chevilles vers le néant (et rien ne sert de lutter), Black Cloud nous précipite dans ses orages émotionnels. Le son est plus noir, plus tranchant, plus inquiétant que jamais.
Si les traumatismes enfuis furent mis à nu au cutter, la sortie de Jane Doe ne les auras pas guéri complètement et Bannon tente de panser cette dépression avec des textes toujours aussi lyrique et une interprétation écorchée vive. Il narre ses échecs et ses ratures, sentimentales et mentales, ceux qu’il a infligés aux autres, ceux que les autres lui ont infligés et surtout ceux infligés à lui-même.

La chute sur le très hardcore Hope Street se poursuit, en traversant tout les étages de la remise en question (notons le très heavy Heartless), pour aboutir sur l’excellent sludge You Fail Me, qui se joue de l’apesanteur : toujours plus bas, toujours plus désespéré.
Les musicos sont à leur sommets respectifs et les morceaux, toujours plus compacts, foisonnants, touffus, sont des véritables panoramas d’écritures (l'excellent Drop Out). Mention spéciale, encore une fois, à Ben Koller, batteur de son état, pour sa frappe juste mais complexe.
Pour ratifier ce moment suspendu, plus aériens, s’ensuit la balade poussiéreuse et maladive In Her Shadow. C’est pour mieux nous faire définitivement perdre pied dans la dernière partie du disque, avec ce duo incandescent Eagles Become Vultures/Wolves At My Door qui se complètent mutuellement.
La temporalité à toute son importance sur cette œuvre avec sa construction particulière. Les morceaux s’enchaînent sans temps-morts, sans intro ou outro. La nature des compositions étant versatile, il est parfois difficile de se rendre compte des transitions entre celles-ci. Ce qui contribue non seulement à ce sentiment d’unité dense entre les morceaux, claustrophobique, mais également à cette irrésistible chute, ce sentiment vertigineux, ce fond qui se rapproche inexorablement vers une fin amer.

On termine sur une touche humoristique avec un aller-retour dans la figure : Death King, In Her Blood (qui renvoit à In Her Shadow) et Hanging Moon expulsent leurs rafales métalliques à coup de riffs syncopés. Il est vrai que l'album, dans son unité extrême, tombe à quelques moments dans une certaine redondance. Il s'agirait bien du seul point imputable tant cette plongée dans l'univers de YFM est intense, fascinante et exaltante. Un autre grand disque, un chouïa en deçà de son prédécesseur, du grand standing dans la mâchoire du le reste du monde.

A-
(fuper !)


mardi 6 septembre 2022

Stromae - (2013) Racine Carrée


En 3 ans, on avait un peu oublié le Bruxellois. Après le succès phénoménal d’Alors On Danse, le premier album devait confirmer les espoirs que la Belgique plaçait en son nouveau poulain. Ce fut un résultat en demi-teinte, dans lequel les médias semblaient trouver tout ça réellement fantastique alors que côté public, il fallait trouver quelqu’un qui avait réellement écouté cet album complet. Même parmi les singles, seul Te Quiero semblait avoir retenu l’attention. Les mois passent et on se rappelle surtout de ce morceau du Hit Connection 2010 qui avait si bien accompagné le mois morose de la rentrée.

Mais avec la sortie de ce second album, le Maestro a trouvé les mots (justes) et les sons (variés).

Dès Ta Fête (assez hymne rock dans l’idée) et ce pour l’ensemble de l’album, le volume de la production, aux reliefs multiples, saute aux oreilles. Sans l’ombre d’un doute, l’artiste à pris de la bouteille et utilise bien mieux ses outils, qui ne sont plus des jouets. 

Au niveau de l’écriture, le jeune homme a également acquis en maîtrise, avec des titres à tiroirs aux mélodies inventives, qui se superposent, parfois dans un même morceau, se jouant des contrepoint.

En témoigne Papaoutai, imparable, avec son texte piquant mais universel et son interprétation solide. L’ensemble de la production bénéficie d’un niveau de chant et d'interprétation bien supérieure, en tout point, à ce que proposait Cheese.

Pour faciliter la comparaison, le dance Bâtard ressemble étonnamment à un titre du premier opus mais avec tout le savoir-faire acquis par l'expérience. Bluffant.

Un autre point fort sont les ponts, les relais et le liant qu’il arrive à créer entre les cultures. Il n’hésite pas à ajouter un quelque chose de rumba, d’afro ou de cubain à des titres comme Ave Cesaria (ces claquements de mains, son accordéons et ses chœurs ! un morceau plein de spleen et d’idées), Tous les mêmes (un grand tube au cuivres déhanchants et au texte réfléchis) ou Humain A l’Eau (hommage anti-raciste revendicateur à son Afrique natale sur des rythmiques syncopées).

Parmi les autres réussites, parlons un peu de ce Moules Frites, petite comptine dansante au sujet grave (le sida) ou encore de cet épatant Carmen. Vous ne vous trompez pas, il s’agit bien de l'œuvre de Bizet, l’air L’Amour Est Un Oiseau Rebelle en particulier. Là où nombre d'artistes se contentent de sampler ou recopier une section (salut les Verves), seul le motif et quelques mots sont repris, mais reconfigurés dans un mix electro-pop au lyrics savamment bien écrite (avec l’aide du camarade Orelsan). On ne peut que reconnaître instantanément l'œuvre au quelle l’hommage est rendue mais sans que celle-ci soit spoliée (notez un clip magnifique, en animation, qui illustrera si habilement qu’il sera bien difficile d’ôter les mots des images pour toutes écoutes ultérieures).

Ajoutons Quand c’est, ses nappes de clavier sombres et ses sons glitch, qui jonglent avec les frontières des genres, entre balade electro-pop, IDM et tip-hop. 


L’album fini sur Merci, un instrumental hautement aboutit au piano mélancolique et aux chœurs d’une tristesse burinante mais rehaussé par l’ambiançant AVF (Allez Vous Faire…), avec les potosses Maitre Gims (qui est en forme et fournit une contribution similaire à ce qu’il faisait chez Sexion D’Assaut) et Orelsan (pareil à lui même, ce qui est meilleur que la plupart des autres). Un morceau qui ne vole pas bien haut mais qui reste d’une efficacité entêtante.


Tout ça pour dire qu’avec ce nouveau longue durée, Stromae a sauté des échelons et des échelles. Peu de choses sont à jeter (peut-être le morceau Sommeil, quelconque, et quelques mots moins sentis), la diversité est de rigueur et le niveau d'exécution général a pris en galons. La suite sera attendue au tournant : il faudra faire aussi bien que cet album abouti, accrocheur et fédérateur.


A-

(et AVF...)


Slipknot - (2001) Iowa


L’enregistrement de cet opus sera un long chemin de croix. Les ego commençant à se gonfler de substances addictives, de groupies faciles et de star-power mal assumée, les 9 de Des Moines se supportent à peine, ne s’écoutent plus, somment chacun une voix au chapitre commun mais enregistrent séparément, de leur côté.
Ross Robinson rempile à la (sur-)prod et sert d’assistant sociale. Mais ce qui s’annonce comme un boxon programmé prendra une tournure toute autre : c’est sans compter sur l’envie commune d'en découdre, de faire l’album qu’ils veulent faire et envoyer balader royalement le monde entier, quitte à se compter parmi les victimes. Au démoulage, on découvre un album noire, féroce, rapide, brutal, viscéral.

Première observation, les morceaux sont tout simplement mieux composés. Toujours sans fioritures, on recense un vrai sens de la mélodie (malgré la violence), des enchaînements excellemment menés et des breaks finement posés. Joey Jordison reste trop sur-mixé et étouffe parfois le reste des instruments, surtout que les cordes sont nettement plus inspirées et de vrais riffs se font entendre. On lui pardonne vite car toujours aussi incroyable techniquement, il ne doit cependant plus porter tout seul certains titres, comme c’était le cas précédemment.

La galette commence très fort avec un enchaînement de hits en devenir : People=Shit (ce long crescendo de haine pure) ; Disasterpieces (un classique) ; My Plage (un morceau death groovy et un refrain “nu”) ; Everything Ends (le plus grand tube du groupe, c’est juste que personne ne s’en est encore rendu compte) et The Heretic Anthem (LE tube de ce disque, avec son break, sa batterie, son refrain racoleur… tout est fou).
Le son, d’une violence inouïe, navigue entre death et hardcore, saupoudré de quelques réminiscences nu-metal soufflée avec justesse.
Corey Taylor a progressé de manière phénoménale et s’impose d’emblée comme un des tout meilleurs chanteurs de musique extrême. Outre ce coffre qui lui permet de littéralement gueuler sans frémir, la palette des émotions et des capacités débloquent celle des possibilités. Ses textes sont encore bien loins d’être poétique (pour certains, ils sont parfaitement stupides) mais il a développé un infaillible sens de la punchline.
Gently, vestige de Mate. Feed. Kill. Repeat. offre un moment de recueillement pestilentiel : une ambiance glauque, où l’hallucination psychotique n’est pas loin, pour une interprétation habitée. Ce morceau est, selon votre humble serviteur, l’illustration parfaite du savoir-faire Iowien en termes de génération d’ambiance. Un titre incroyable.
A partir de ce moment, l’album ralentit de rythme et perd légèrement le suffrage du plus grand nombre. Là où Left Behind a sa réputation de single pour lui et n’a rien à prouver sur son potentiel mélodique, The Shape, I Am Hated , New Abortion et Metabolic attire quand même l’oreille par leur capacité à faire très bien avec moins. Effectivement, ces morceaux n’ont jamais été des classiques du groupe (et ne furent pour ainsi dire plus jouées en concert après la tournée promotionnelle de celui-ci). Cependant, elles recèlent chacune d’un quelque chose, une bonne idée, un parti pris attrayant. Là où la nonette était parfois prise en flagrant délit de remplissage plus que maladroit et grimait une bonne idée d’un fard vulgaire, ils arrivent ici à convertir l’essai et rendre intéressants leurs morceaux à priori moins inspirés. Bonifier ses temps faibles est une force en soi, qui n’est pas donné à tout le monde, et le signe que le métier entre.
Finissons sur deux belles pièces en les personnes de Skin Ticket et Iowa. Je regroupe ces deux titres car ils font partie de ces morceaux que j’aime appeler “à ambiance”, non pas purement ambiant mais possédant une réelle atmosphère, en l'occurrence extrêmement malsaine et dérangeante. Le premier est complètement plombé, organique, et le second, le morceau titre, une longue complainte de 15 minutes à la limite de la démence. Un délice durant lequel on a pu  admirer le talent de Craig Jones et Sid Wilson.

Bien, bien… Reste le grand débat de sa vocation commerciale. Joey Jordison avait, à l’époque, conté à l’illustre Kerrang! : "Iowa, encore plus que le premier disque, était l’album que nous voulions vraiment réaliser”. Outre mettre en lumière les contraintes inhérentes au premier compact, il éclaire sur la volonté du groupe d’envoyer un message et d’y parvenir avec le second. Cet album est trop organique et rempli de haine adolescente pour être complètement malhonnête. En outre, pour contre-exemple, prenez à peu de chose près n’importe quel obus des 20 dernières années d’un groupe comme Cannibal Corpse (au hasard, rien de personnel) avec tous les codes (clichés ?) qu’il se trimbale (pochette dégueu, blasts, prod de cave, riffs carrés, chant typé) et dites moi qu’il n’est pas calibré pil-poil pour un public cible. Sont-ils taxés de groupe commercial ? Alors quand un groupe joue avec ses tripes aussi violemment et fort que Slipknot, je ne vois pas en quoi ils le sont plus. Je vous laisse sur cette pierre qui roule et je m’en vais troller plus loin.
Bise, hein, dis…

A-
(but maybe it's wrong, fucked and over-rated)

samedi 3 septembre 2022

~X Nine Inch Nails - (2007/11) Y34RZ3R0R3M1X3D (Year Zero Remixed)

 

Novembre 2007 - Sur Discogs

Reznor est en fin de contrat avec son label Interscope et ne rêve que de liberté. Problème : sur papier, il lui reste un album à fournir et comme il a plutôt envie de les envoyer chier, il ne se prend pas trop la tête. Il invite des connaissances, des producteurs et autres remixeurs professionnels à travailler sur les morceaux de son dernier opus, Year Zero, d’en faire une compil et de balancer l’os au producteurs morfals. La démarche est forcée, la conviction abonnée absente. L’espoir reste que ce perfectionniste rechignerait à offrir un torchon au peuple juste par intérêt et qu’il prendrait le projet, si le bras le corps est impossible, du bout des doigts.


Premier constat, aucun doublon dans les titres retravaillés (sur la version CD, celle de référence pour cette chronique) contrairement aux albums de remix précédents. Un bon point car nous avions eux nos doses de Starfuckers, Inc. ou autre Mr. Self Destruct.

La liste des intervenants est presque aussi longue que celle des morceaux présents sur la galette (12 pour 14 morceaux) ce qui devrait assurer une certaine diversité dans les mets.


Saul Williams, le protégé de Trent (pour qui il produit le LP Niggy Stardust) fournit l’entrée avec une version de Hyperpower!, qui n’a pas été retouché d’un son, mais sur lequel l'intéressé badigeonne son flow avec la justesse qu’on lui connaît. Bien que la démarche semble simpliste, le résultat est très énergique et péchu. Plus loins, sa remix de Survivalism, trip-hop glitch propose un vrai re-travail et un résultat efficace voire carrément entêtant. Très bien.

Modwheelmood, le side-project du claviériste live du groupe (Alessandro Cortini), a le coup de main et livre quant à lui une remix vraiment intéressante du monument Great Destroyer en ne se basant que sur son aspect mélodique et une approche etherreal du plus bluffant effet. 

Arrive alors une curiosité. A l’époque de la sortie de ce disque, le site officiel de NIN était devenu un temple tentaculaire pour les fans : une multitude de médias, un forum et un domaine dédié uniquement aux remix de fans. Reznor tombe sur une remix dance de My Violent Heart et décide de l’ajouter au cut final de cette compilation. Il faut bien avouer que cette version est très réussie, une vraie réinterprétation. Ce parti pris dansant est, à part entière, un des visages de ce disque. En témoigne la participation de Ladytron, compagnon de tournée, avec cette savante version techno dansante de la ballade The Beginning Of The End (qui termine sur le motif de The Downward Spiral, clin d'œil sympa). Les bigbeat Capital G d’Epworth Phones et le french funky house (à la Daft Punk) de Meet Your Master pondu par The Faint réchauffent les lombaires et les talons. La version IDM de Me, I’m Not concoctée par Olof Dreijir est plus que osée, le morceau étant pour ainsi dire méconnaissable. Très épurée, tournant pour ainsi dire autour de percussions technos issues de micro-samples de l’original , le morceau s’égare malheureusement sur la longueur (14 très longues minutes !). Ce n’est pas indigent mais pas tout à fait réussi. Côté dancefloor, notons la décevante apport de Stephen Morris et Gillian Gilbert de New Order sur God Given qui est plus un mix alternatif qu’une remix. Une démarche similaire lors de leur deuxième essai, en dessert, Zero-Sum, mais pour un dressage plus réussi.


Dans le registre “passable”, Bill Laswell (qui participe à tous les albums remixs du monde) n’est pas très inspiré sur son mix alternatif de Vessel. Le The Warning de Stefan Goodchild et Doudou N'Diaye Rose se montre plus convaincant avec sa rythmique plus martiale mais son apport quasi nul.

On terminera sur cette offrande très etherreal et dark ambiante d’In This Twilight par l’autrichien Fennesz, au poil, et puis, surtout, sur ce magnifique plat de résistance Another Version Of The Truth du Kronos Quartet avec Enrique Gonzalez Müller, aux instruments à cordes (frottés) tourmentées et ses nappes électroniques inquiétantes. Quelque chose qui ressemble un peu à ce qui a été entendus avec le déjà très beau The Frail sur Things Falling Apart.


Et bien mes aïeux, contre toute attente, que de choses à dire ! Mais pourquoi tant d'indifférence -que dis-je ?- de dédain général ? L’album a souffert de cette vision de brebis galeuses donnée en pâture, la communication n’a pas aidé. La comparaison avec l’arty et visionnaire Further Down The Spiral est encore et toujours inévitable mais n’a plus de sens. Celui-ci est une collection de remix, pas un concept album. Et à ce jeu là, celui avec l’EP de remix qu’avait échut The Fragile est tout à l’avantage du sujet de cette chronique. Facile, je vous l’accorde

Une orientation globale trop dance ? Sûrement, ça ne fait pas très sérieux et on aime bien avoir l’air ténébreux dans la fanbase du groupe. Le choc culturel. C’est oublié l’amour du maestro pour ce style. 

Pour ma part la diversité, l'éclectisme, le fun, certaines audaces, et, tout simplement, la qualité des remixs permettent finalement de passer un agréable moment, certes longuet. Un peu fan-service, c’est évident. Faites vous plaisir, si vous avez aimé Year Zero, ouvrez un peu plus les œillères, laissez frétiller vos genoux et, j’espère que vous trouverez ce que je lui ai trouvé. Sinon, c’est pas grave, hein, c’est peut-être moi qui me trompe.

B
(pour une fiesta de fin du monde)

The WRS - (2022) Capicúa

Sur Discogs Si tu sors plus de deux albums, en Belgique, t'es obligé d'avoir une couv' d' Elzo ( Le Prince Harry, My Dilige...