mardi 6 septembre 2022

Stromae - (2013) Racine Carrée


En 3 ans, on avait un peu oublié le Bruxellois. Après le succès phénoménal d’Alors On Danse, le premier album devait confirmer les espoirs que la Belgique plaçait en son nouveau poulain. Ce fut un résultat en demi-teinte, dans lequel les médias semblaient trouver tout ça réellement fantastique alors que côté public, il fallait trouver quelqu’un qui avait réellement écouté cet album complet. Même parmi les singles, seul Te Quiero semblait avoir retenu l’attention. Les mois passent et on se rappelle surtout de ce morceau du Hit Connection 2010 qui avait si bien accompagné le mois morose de la rentrée.

Mais avec la sortie de ce second album, le Maestro a trouvé les mots (justes) et les sons (variés).

Dès Ta Fête (assez hymne rock dans l’idée) et ce pour l’ensemble de l’album, le volume de la production, aux reliefs multiples, saute aux oreilles. Sans l’ombre d’un doute, l’artiste à pris de la bouteille et utilise bien mieux ses outils, qui ne sont plus des jouets. 

Au niveau de l’écriture, le jeune homme a également acquis en maîtrise, avec des titres à tiroirs aux mélodies inventives, qui se superposent, parfois dans un même morceau, se jouant des contrepoint.

En témoigne Papaoutai, imparable, avec son texte piquant mais universel et son interprétation solide. L’ensemble de la production bénéficie d’un niveau de chant et d'interprétation bien supérieure, en tout point, à ce que proposait Cheese.

Pour faciliter la comparaison, le dance Bâtard ressemble étonnamment à un titre du premier opus mais avec tout le savoir-faire acquis par l'expérience. Bluffant.

Un autre point fort sont les ponts, les relais et le liant qu’il arrive à créer entre les cultures. Il n’hésite pas à ajouter un quelque chose de rumba, d’afro ou de cubain à des titres comme Ave Cesaria (ces claquements de mains, son accordéons et ses chœurs ! un morceau plein de spleen et d’idées), Tous les mêmes (un grand tube au cuivres déhanchants et au texte réfléchis) ou Humain A l’Eau (hommage anti-raciste revendicateur à son Afrique natale sur des rythmiques syncopées).

Parmi les autres réussites, parlons un peu de ce Moules Frites, petite comptine dansante au sujet grave (le sida) ou encore de cet épatant Carmen. Vous ne vous trompez pas, il s’agit bien de l'œuvre de Bizet, l’air L’Amour Est Un Oiseau Rebelle en particulier. Là où nombre d'artistes se contentent de sampler ou recopier une section (salut les Verves), seul le motif et quelques mots sont repris, mais reconfigurés dans un mix electro-pop au lyrics savamment bien écrite (avec l’aide du camarade Orelsan). On ne peut que reconnaître instantanément l'œuvre au quelle l’hommage est rendue mais sans que celle-ci soit spoliée (notez un clip magnifique, en animation, qui illustrera si habilement qu’il sera bien difficile d’ôter les mots des images pour toutes écoutes ultérieures).

Ajoutons Quand c’est, ses nappes de clavier sombres et ses sons glitch, qui jonglent avec les frontières des genres, entre balade electro-pop, IDM et tip-hop. 


L’album fini sur Merci, un instrumental hautement aboutit au piano mélancolique et aux chœurs d’une tristesse burinante mais rehaussé par l’ambiançant AVF (Allez Vous Faire…), avec les potosses Maitre Gims (qui est en forme et fournit une contribution similaire à ce qu’il faisait chez Sexion D’Assaut) et Orelsan (pareil à lui même, ce qui est meilleur que la plupart des autres). Un morceau qui ne vole pas bien haut mais qui reste d’une efficacité entêtante.


Tout ça pour dire qu’avec ce nouveau longue durée, Stromae a sauté des échelons et des échelles. Peu de choses sont à jeter (peut-être le morceau Sommeil, quelconque, et quelques mots moins sentis), la diversité est de rigueur et le niveau d'exécution général a pris en galons. La suite sera attendue au tournant : il faudra faire aussi bien que cet album abouti, accrocheur et fédérateur.


A-

(et AVF...)


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