jeudi 8 septembre 2022

Stromae - (2022) Multitude

 


Une nappe de clavier froide, un chœur world d’outre-tombe et des lyrics d’enragés. Ainsi commence le premier album en neuf ans de l’international bruxellois Stromae. Neuf longues années passées à gravir les échelons de la gloire, à trébucher sur ses travers et à chuter dans le précipice de la dépression. Le jeune homme est marqué psychologiquement et physiquement, il se cache dans le contre-jour des projecteurs, pour se protéger, et ses amateurs l’attendent. Avec ce premier titre, Invaincu, crescendo vindicateur, il balance un pied à la face de cette maladie invisible et l’autre à l’étrier. Efficace.
S’ensuit Santé, premier titre à avoir émergé sur le net, avec sa guitare sèche et son sifflement samplé capiteux, un pur produit estampillé Stromae.

La fête à la déprime continue avec la triplette La Solassitude (ses basses sous-marines), l’excellent et engagé Fils De Joie (une interprétation aboutie et des textes au top soutenant une boucle de violon entraînante mais mélancolique) et le tube L’Enfer.

Ce dernier représente parfaitement l’approche musicale et de production de cette galette, plus épurés que Racine Carré, tout aussi inventive, mais d’une habileté d'exécution de très haute gamme. L’auteur-compositeur ne se sent plus dans l’obligation de nous faire danser pour nous charmer et écrit ce qu’il ressent, dont ce texte très personnel, sensible. Un morceau simple mais qui sonne comme il doit.

En hommage à celui-ci, qui le comble de joie, Paul écrit C’est Que Du Bonheur, pour son fils, pour lui expliquer toutes les misères d’avoir un enfant. Reviens gamin, c’était pour jouer, surtout que ça n’invente vraiment pas le lait en poudre mais c’est sacrément bien écrit.

Ce jonglage entre instruments traditionnels du monde et l'électro-pop d’aujourd’hui restent la marque de fabrique de l’artiste, comme sur Pas Vraiment, sa mélodie imparable au ney turque et son phrasé savant en contre-temps. 

Plus loin, Mon Amour, petite balade inoffensive au ukulélé parle des déboires de l’adultère sur une mélodie indécollable (ce contraste musique/texte nous ramène à Moules Frites sur l’opus précédent). On clôt ce nouveau chapitre de l’artiste avec l'étonnant diptyque Mauvaise Journée / Bonne journée. Le premier au consonance latino revient sur le thème de la dépression : un titre sombre, chanté avec émotion. Mais la lumière et l'espoir s'aperçoivent au bout du scion, sur Bonne Journée, miroir musical et thématique de la moins bonne, qui prouve, encore une fois, que tout est une question de perspective. Un mouve astucieux et réussi.


Je ne sais pas ce qu’on pouvait attendre après neuf ans mais un album honnête et plus personnel me convient très bien. Court, le bas blesse quand il faut compter les compos en deçà, Riez ou Déclaration, mais le sens de la mélodie et la production aux petits oignons en font, en fait, des moments plus que sympathiques. Qu’y-a-t-il à jeter sur cet album ? Rien, sincèrement. Qu’est-ce qu’il y a à porter au nue ? Un peu de tout, pas grand chose. Un retour en grâce, moins varié que le précédent, plus maîtrisé, moins fédérateur, plus personnel. Encore une fois, tout est une question de perspective.


A-

(plutôt côté Bonne Journée)


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