jeudi 26 janvier 2023

Coil - (1985) Scatology



Dans la foulée de l'enregistrement de leur premier EP, le duo poursuit son travail et cisèle son premier longue durée. Dans la logique thématique de cet effort, qui sonnait comme le sous-sol de leur édifice, les britanniques se lancent cependant dans une collection de morceaux, comme autant de pièce de puzzle, ou de vie, construisant cette demeure où l'on sniffe, on baise, on pique, on se déchire, on s'entre-déchire, on s'oublie, on se dépose, on se décharge, on créé...

Cet album est saisissant, de par son approche sans compromission, ses fondements résolument modernes voire avant-gardistes et son exécution maîtrisée.
Comme l'annonce Ubu Noir, avec ses boucles triturés, indéchiffrables, absent de tout instrument, construit de samples et de bruits, soustraits, rajoutés, modifiés, modulés et transformés en musique : l'approche Industrial réminiscente d'un Throbbing Gristle (TG) n'est déjà plus une démarche mais un mode de fonctionnement. En cet absence d'attachement à toute musique savante, ils rédigent leurs propres sciences, leurs propres codes. Genesis P-Orridge soulignait que TG était les seuls punks, de par leur vrai approche "non-musicienne" et le DIY permanent, mais là où les kids pouvaient se rêver aussi (peu) virtuose que leurs idoles, et le mouvement s'en nourrissait, le niveau d'expertise affiché par un Christopherson rabaisse toute velléité d'identification. Ils n'en ont pas besoin. Balance sera cette contre-balance, ce sel humain, ce facteur x, l’élément versatile. 
Comme sur ce Panic, un vrai plaisir d'ingé son où John hurle et geint comme un malheureux, la machine l'absorbant complètement. Les rythmiques sont multiples, les contre-points une base de travail. Un véritable hymne industriel qui renvoie à des Front Line Assembly, parfois Front 242 mais surtout Skinny Puppy. L'album est d'ailleurs très martial est reflète en cela son époque (je pense à ces Aqua Regis et Solar Lodge qui partagent leur sonorités avec celle des contemporains Einsturzende Neubauten). Ce somptueux Restless Day, à l'instru tendue et à la mélodie vocale de comptine, le tout saupoudré des bruitisme malsain au feeling neo-folk. Difficile d'imaginer qu'approximativement toute la scène industrielle des années 80 et 90 n'ai pas été influencé dans la plastique, la rythmique, les sons et la structure de morceaux comme ceux-ci.

L'ambiant At The Heart Of It All, dont les moments de recueillement se voient striés de longues complaintes electroniques stridentes et de quelques notes de piano spleen nous pose la question : est-ce au cœur de l'enfer que celui-ci est le plus calme ? Un de ces morceaux qui raconte une histoire au même titre que l'interlude Clap, halletant, ou l'entraînant GODHEAD = DEATHEAD.

S'il faut chercher la bête, on trouve toujours, la prestation de John montre très vite et clairement ses limites techniques, sans compromettre son intégrité et son authenticité mais la limitant cruellement. Sur le pourtant très intéressant Tenderness Of Wolves, son chant suintant la dépravation en deviendrait caricatural s'il n'était subtilement couplé à cette rythmique assommante, ces cris d'enfants et ses nappes humides. Même constat sur le schizophrénique et maladif The Spoiler qui, en outre, sans être raté, souffre de sa rythmique frénétique. Cherchant une musique rituelle et spirituellement stimulante, le groupe n'aide pas vraiment son album en y appliquant avec une telle assiduité des structures répétitives, qui peuvent sembler redondantes. 

Le disque se termine originellement sur une autre belle histoire, le solennel Cathedral In Flames. Certaines versions rajoutent l'excellente et cultissime reprise grave et lourde de Tainted Love de Cold Cell (et son clip dingue). Un morceau d'histoire se referme ainsi qu'un grand moment de musique. Un premier LP encore fragile, parfois rattrapé par ses intentions et convictions mais dégageant une vraie personnalité et une sensibilité propre, servant de terreaux fertile à tant d'esprits créatifs ultérieurs. Absolument fascinant.

A-
(y a un cul sur la pochette, lol)

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